Quel que soit le résultat, le vote d'aujourd'hui aux États-Unis va donner le ton des deux semaines de négociation. D'un coté, Donald Trump a pris violemment position contre la politique climatique mené par le président Obama et en cas de victoire il a promis "d'annuler l'Accord de Paris". De l'autre, Hillary Clinton se placerait probablement dans la continuité des années précédentes mais une large victoire au Sénat voire à la Chambre des Représentants pourrait aider à lever les doutes sur les politiques engagées par Barack Obama, notamment sur la capacité de l’exécutif de réglementer les émissions et ratifier l'Accord de Paris sans passer par le Congrès.
Remember, remember the COP of November (2000)
Même si Halloween est déjà passé, jouons un instant à nous faire peur et imaginons que Donald Trump l'emporte ce soir. Quelles pourraient être les conséquences de cette victoire sur la COP22 ?
C'est la première fois que l'élection américaine tombe pendant une conférence sur le climat. Mais il existe quand même un précédent intéressant : la COP6 qui s'est tenue à la Haye du 13 au 24 novembre 2000.
Cette année-là l'élection américaine oppose le démocrate Albert Gore au républicain George Bush. Le premier est un partisan de l'action climatique, le second est issu d'une famille de pétroliers et gouverneur du Texas, un des États américains qui possède à la fois des ressources en pétrole et en charbon.
L'élection américaine se déroule le 7 novembre, la semaine précédant l'ouverture de la Conférence mais le résultat reste incertain. Il est très serré en Floride, qui est comme cette année un État clé. Les votes doivent être recomptés. La victoire de Georges Bush ne sera confirmée par la Cour Suprême que le 12 décembre.
La COP6 s'ouvre dans ce contexte avec notamment pour objectif de négocier la mise en œuvre du Protocole de Kyoto adopté en 1997. Les États-Unis, qui ont signé mais pas ratifié le Protocole, souhaitent pouvoir utiliser au maximum les mécanismes de flexibilités prévus par le texte. Ils sont soutenus par une petite mais puissante coalition : le Groupe parapluie. L'Union Européenne veut au contraire en limiter l'usage. Une négociation déjà tendue se déroule alors qu'il devient de plus en plus évident que Georges Bush va l'emporter.
Georges Bush n'a pas de position précise sur la lutte contre le changement climatique, il a critiqué le protocole de Kyoto mais il s'est prononcé pour un marché du carbone et en tant que gouverneur il a soutenu des mécanismes de ce type pour d'autres polluants. Il faudra à la nouvelle administration des mois pour définir sa position et nommer ses nouveaux responsables. La seule certitude au moment où la victoire des Républicains se précise, c'est que le mandat confié aux négociateurs américains pour la COP6 n'a plus guère de valeur.
Trop d'incertitudes, la COP est suspendue
Face à cette impasse, le ministre de l'environnement néerlandais, qui préside la conférence, décide de suspendre la COP6. Le 20 janvier 2001 Georges Bush prête serment et le 29 mars il annonce que les États-Unis ne ratifieront pas le Protocole de Kyoto.
Une COP6bis a lieu en juillet 2001 à Bonn. A la surprise générale, elle permet de remettre le Protocole de Kyoto sur les rails. En réalité l'UE cède sur presque tout sans parvenir à ramener les États-Unis dans le processus, dont ils resteront à la marge pendant presque 15 ans.
La situation de la COP6 rappelle celle que nous connaissons en ce moment : un accord qui reste à préciser, une élection américaine qui s'annonce serrée et un candidat qui menace d'en retirer son pays. Il existe aussi des différences : l'Accord de Paris est déjà en vigueur, la situation entre les Etats-Unis et ses partenaires est moins tendue et le monde est devenu plus multipolaire. L'histoire ne repasse pas les plats…
Reste qu'en cas de victoire de Donald Trump, l'équation de la COP22 deviendrait un peu plus impossible et la tentation déjà forte d'en faire une COP pour rien pourrait l'emporter.
Publié le 8 novembre 2016 par Thibault Laconde
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