Entretien avec Christophe Neugnot : "Orano ressemble à la Cogema mais le monde a changé"

J'ai eu hier matin une longue discussion avec Christophe Neugnot, qui est directeur de la communication d'Orano après avoir été celui d'Areva. L'échange a porté sur la nouvelle entreprise mais aussi plus largement sur la restructuration de l'industrie nucléaire française et sur l'avenir du nucléaire, il me semble suffisamment intéressant pour le publier in-extenso.

Comme c'est un peu long, vous pouvez utiliser ces liens pour passer directement à la partie qui vous intéresse :

Alors, on est dans la tour Areva ou ou dans la tour Orano ?


Orano reprend les activités cycle nucléaire d'ArevaCe qui est important, c'est de comprendre que le groupe Areva a cessé formellement d'exister il y a 6 mois quand la partie cycle du combustible, ce qui est aujourd'hui Orano, a quitté son giron.
Avec Areva, on avait un groupe qui avait toutes les composantes du nucléaire sauf l'exploitation des centrales, de l'exploitation minière jusqu'à la construction et la maintenance des réacteurs et au démantèlement.
Le gouvernement a décidé en juin 2015 de restructurer la filière et ce groupe a été scindé en 3 parties : la partie réacteur, c'est-à-dire fabrication, maintenance et services associés, est désormais une entité qui s'appelle Framatome et qui a rejoint EDF. La deuxième partie, c'est Areva SA - la marque Areva continue à exister : Areva SA est en charge de terminer le projet de réacteur OL3 en Finlande. La troisième entité, c'est Orano. C'est-à-dire toute la partie cycle du combustible.

Est-ce qu'on peut dire qu'Areva SA est devenue une structure de défaisance ?


Non, on ne peut pas dire ça. Areva SA compte 800 ingénieurs et a un budget de plusieurs milliards d'euros : elle doit terminer un projet et elle a les moyens humains et financiers pour le terminer.

Comment s'est passé ce démantèlement d'Areva ?


Ça a commencé il y a plus de deux ans, en 2015. Le gouvernement et le président de la République de l'époque ont pris la décision de restructurer la filière et de rapprocher les réacteurs de l'exploitant français, EDF. A partir de là, il a fallu mettre en oeuvre cette décision, ça a été un long processus parce qu'il a fallu organiser la scission des différences entités, ce qui a duré de juin 2015 jusqu'à juillet 2016. En juillet 2016, les différentes entités ont leur propre management mais sont toujours dans le même groupe. A coté de ce volet organisationnel interne, il y a la décision de recapitaliser la filière, avec deux recapitalisations : une qui concerne Orano à hauteur de 2.5 milliards d'euros pour l'Etat auquel s'ajoute l'entrée au capital de partenaires japonais à hauteur de 500 millions d'euros, une pour Areva SA de 2 milliards d'euros pour pouvoir terminer le projet de réacteur en Finlande.
La première année, on prépare donc l'ensemble de la réorganisation : on acte en juillet 2016 la séparation des entités même si on est encore dans le même groupe et parallèlement, comme vous avez recapitalisation, vous devez avoir l'autorisation des autorités européennes qui a été donnée début 2017. A partir de juillet 2017, les recapitalisations sont effectives et les entités se séparent. Et ça se termine avec la cession formelle de Framatome à EDF qui a eu lieu fin 2017.

Aujourd'hui le groupe Areva n'existe plus.

Un autre article sur ce sujet : De Framatome à Areva et vice-versa : histoire et déboires de l'industrie nucléaire française


Que sont devenues les activités propulsion nucléaire et renouvelables ?


L'activité propulsion nucléaire, désormais TechnicAtome, a été cédée. Et on a cédé également l'activité énergies renouvelables. Ça fait partie des obligations que nous avions vis-à-vis des autorités européennes de la concurrence : à partir du moment où vous avez une recapitalisation, l'entreprise concernée doit faire un certain nombre d'efforts qui se traduisent par des cessions et également un plan de départ volontaire et des économies.

Et donc Orano...


Christophe Neugnot, directeur de la communication d'Areva puis Orano (© François Maréchal)Ces décisions se traduisent pour nous par le recentrage sur l'activité cycle du combustible avec des métiers très divers qui vont de la mine au démantèlement.
Orano a 6 activités. Deux en amont : production d'uranium avec les activités, d'une part, et conversion et enrichissement, c'est-à-dire toute la transformation de l'uranium, d'autre part. Cependant on ne fabrique pas le combustible, c'est Framatome qui s'en occupe.
En aval : on récupère le combustible après le réacteur et on le recycle afin de produire  à nouveau du combustible et de réduire le volume de déchets.
S'ajoute à ça trois activités transverses :
  • la logistique et les transports, on est le n°1 mondial du transport de matière nucléaire avec 4000 transports par an et on fournit également des emballages d'entreposage. 
  • l'ingénierie, la conception des usines et des équipements, c'est notamment le projet qu'on a avec la Chine, 
  • enfin le démantèlement où nous nous spécialisons dans les parties les plus sensibles, celles où il y a eu le combustible, et les services.
Voilà pour le cycle nucléaire, la valorisation des matières et la gestions des déchets. A coté de cela, on a une activité qui est lancée mais encore en devenir : travailler dans le domaine médical et fournir des radioéléments aux chercheurs pour le traitement de cancers.

Le groupe Orano représente 4 milliards d'euro de chiffre d'affaire, 16.000 personnes dans le monde, 12.000 en France. Beaucoup d'usines en France mais très orienté vers l'international : le chiffre d'affaire est à 60% à l'international.
Et dans chacune de nos activités nous avons de très bonnes positions : nous sommes dans les trois premiers mondiaux pour les mines, pareil pour la conversion et l'enrichissement, nous sommes premiers sur le recyclage et la logistique. Pour le démantèlement, nous sommes l'un des leaders mondiaux dans notre domaine.
Notre ambition est d’être l’acteur de référence pour la production et le recyclage des matières nucléaires, la gestion des déchets et le démantèlement.

Quel est la structure de votre actionnariat ?


L'actionnariat va être simple : 90% pour l'Etat directement ou indirectement et 10% pour deux groupes japonais travaillant dans le nucléaire - 5% pour MHI et 5% pour JNFL.
Je dis "va" parce que l'entrée formelle au capital des actionnaires japonais aura lieu dans les semaines à venir. Sachant qu'à terme rien n'empêche que l'actionnariat évolue.

Finalement, ça ressemble beaucoup à la Cogema. On voit que Areva NP est redevenu Framatome, Areva TA est redevenu TechnicAtome, qu'est-ce qui vous pousse vous à vouloir changer d'identité ?


Vous avez raison : le périmètre d'Orano est proche de celui de la Cogema. Mais nous ne sommes plus du tout dans le même monde.
En interne, à peu près tout a changé par rapport à ce qu'était Cogema. Par exemple, nous avons de nouvelles mines : Cogema n'avait pas les mêmes mines au Canada et pas de mines au Kazakstan. Nous avons aussi deux nouvelles usines pour la conversion - c'est-à-dire les procédés chimiques permettant de transformer du minerai d'uranium en hexafluorure d'uranium, et pour l'enrichissement. Ce sont les plus modernes au monde : nous avons fait cet investissement alors que nos concurrents ne l'ont pas fait. Avec ces nouvelles usines nous enrichissons suffisamment d'uranium pour produire de l'électricité bas-carbone pour 90 millions de foyers, soit l'équivalent de tous les foyers allemands, français et anglais. L'usine de recyclage de Melox, qui fabrique du combustible MOX à partir de plutonium recyclé et d'uranium appauvri, se lançait juste quand nous étions Cogema, sa montée en puissance a eu lieu dans la phase Areva. Concernant l'ingénierie, nous ne travaillions pas sur les mêmes projets, la logistique existait mais elle était moins développée sur la partie emballage et entreposage et nous n'avions pas cette activité en développement qu'est la partie médicale.
En externe, le contexte a complètement changé, ce n'est plus le même monde : les renouvelables ont pris leur place, nous n'avions pas le même type de contrat, nous étions dans un monde beaucoup moins concurrentiel et beaucoup plus occidental, aujourd'hui nous avons des concurrents chinois ou japonais.

Tout cela fait que nous ne sommes plus le groupe Areva mais nous ne sommes plus non plus la Cogema, le contexte a trop changé. Nous avons un nouveau projet d'entreprise, un nouveau plan d'action stratégique, une nouvelle organisation du groupe... qui devaient s'incarner dans une nouvelle image.

En dehors de l'internationalisation et de l'arrivée de nouveaux concurrents, est-ce qu'il y a d'autres choses qui ont changé depuis les années 90 ?


Il y a un changement énorme : c'est la problématique du réchauffement climatique. Pendant des décennies, le marché de l'énergie était dominé par les énergies fossiles, il le reste à 80% mais la problématique climat devient l'enjeu n°1.
La voiture électrique jusqu'à présent était un voeu pieux. Aujourd'hui, je pense qu'elle va vraiment se lancer tout simplement parce que nous n'avons pas le choix. J'ai été interpellé par une étude récente qui montre que la première préoccupation des jeunes chinois urbains est la qualité de l'air. Le sujet environnemental, avec d'un coté le dérèglement climatique et de l'autre côté la qualité de l'air, bouleverse tout.

Un autre article sur ce sujet : Du projet Manhattan au changement climatique : une brève histoire de la communication pro-nucléaire


Le deuxième bouleversement, c'est la montée en puissance des renouvelables. Chacun peut avoir son avis sur le sujet mais le fait est que les renouvelables vont monter en puissance. Areva a eu des activités renouvelables - éolien off-shore, solaire à concentration, etc. - nous n'allons pas tomber dans le déni en disant : "ça ne fait plus partie de nos activités, ça ne sert à rien". Nous avons été, du fait de ce qu'était Areva, de fervent militants du mix nucléaire-renouvelables. Même si nos activités sont recentrées sur le nucléaire, on reste chez Orano des militants du mix énergétique nucléaire-renouvelables. Mais sans tomber dans l'admiration béate : le 100% renouvelable, on n'y croit pas du tout avec les technologies actuelles. Les choix énergétiques sont des choix de long-terme et on ne peut pas prendre une décision pour les décennies à venir sur la base d'une rupture technologique potentielle.

Troisième point : c'est l'augmentation des besoins en électricité. Ce qui est clair, c'est que dans le monde ils vont croître : plus d'urbanisation, de nouveaux besoins - digital, voiture électrique, une population qui va encore augmenter...
Les projections pour la France prévoit une demande stable. Nous, ça nous questionne. Si le parc de voiture électrique se développe réellement, comment va-t-on s'organiser si tout le monde recharge à 19h le soir ? Il faut un sacré parc de production...

Mais ce ne sera pas un parc nucléaire, parce que les centrales nucléaires ne vont pas faire un pic à 19h pour charger des voitures... Dans cette perspective d'un mix EnR-nucléaire, on se retrouve avec deux moyens de productions qui sont assez peu modulables.


Ça ne peut pas être que nucléaire. Mais un système qui ne serait que renouvelables, par exemple éolien-solaire, ne marche pas non plus. Il faut les deux.

Un autre article sur ce sujet : Le nucléaire est-il assez flexible pour travailler avec les renouvelables ?


A ce sujet, lorsqu'on discute d'énergie en France on tombe parfois sur des gens qui semblent penser qu'il y a un modèle français repliquable ailleurs : "nous sommes passés de 25 à 75% de nucléaire en l'espace de 10 ans, on pourrait résoudre ces questions environnementales si tout le monde faisait comme nous." J'aimerais avoir votre regard de spécialiste du cycle nucléaire là-dessus : est-ce qu'une augmentation de la production nucléaire à l'échelle mondiale par exemple jusqu'à 20, 25% ou au-delà serait envisageable, ou est-ce qu'il existe des limites, des goulots d'étranglement dans vos activités ?


Sur l'évolution du parc nucléaire mondial, je pense que plus le sujet du dérèglement climatique va monter en puissance, plus les pays vont se tourner vers le nucléaire parce qu'ils vont avoir besoin d'une sécurité d'approvisionnement. Un pays qui est en train de se développer a besoin de certitudes sur sa fourniture d'électricité.
Mais il faut quand même être réaliste, on peut difficilement imaginer que tous les pays adoptent un mix français à 75% de nucléaire ou même à 50%.

Si vous êtes dans une augmentation qui est mesurée parce que vous avez un équilibre entre renouvelable et nucléaire, il n'y a pas fondamentalement de problème d'alimentation. Pour prendre l'exemple de l'uranium, vous avez peu ou prou besoin de 60.000T d'uranium pour fournir le parc nucléaire mondial. Actuellement la production a un peu baissé parce que le marché a baissé mais vous avez de nouvelles mines qui peuvent être lancées : tous les mineurs ont des projets. Nous les premiers : on a la mine d'Imouraren au Niger que nous avons mise sous cocon qui a de l'ordre de 150.000T de réserves, on a un projet en Mongolie en phase pilote avec 60.000T de réserve... Donc en fourniture d'uranium, vous n'avez pas de problématique.
Pareil pour la conversion et l'enrichissement, on peut répondre en restant dans des scénarios raisonnables.

Est-ce que vous pourriez mettre un ordre de grandeur sur ce qui est raisonnable et ce qui ne l'est pas ?


Nous sommes sur des scénarios de l'AIEA qui précisent que si on veut lutter efficacement contre le déréglement climatique, la part de l’énergie nucléaire au niveau mondial devra passer de 11,5% actuellement à 17% en 2050. Sur cette trajectoire il n'y a pas de problème. Maintenant si tout le monde découvre les bienfaits du nucléaire ou si le renouvelable butte et qu'on n'a pas d'autres choix que de développer le nucléaire, on peut passer à d'autres générations de réacteurs où la question des ressources ne se pose plus.

Mais là vous trichez : vous avez dit tout-à-l'heure qu'on ne peut pas faire des choix énergétiques sur la base d'une rupture technologique à venir.


Oui et non : les réacteurs à neutrons rapides certes ne sont pas industrialisés mais la technologie existe.
Mais honnêtement je ne peux pas vous dire que le nucléaire va passer de 10 à 40%... Là il faudrait probablement un changement complet. Pour être sincère, oui : il faudrait qu'on ait des ruptures technologiques.

Je voudrais passer à un autre sujet : vous vous positionnez comme acteur du démantèlement. Comment voyez-vous les discussions en cours autour de la PPE notamment et qui nous amènent vers un scénario de fermeture assez rapide d'une dizaine de réacteurs nucléaires en France ? Est-ce que vous seriez capables de répondre à cette demande ?


Le démantèlement et la gestion des déchets ne sont pas des problèmes techniques. Il faut arrêter de faire croire qu'il n'y a pas de solution, c'est faux.
Le démantèlement, ça prend du temps, ça coûte de l'argent - d'ailleurs ça fait l'objet de provisions de 7 milliards d'euros pour Orano, mais on sait faire. Le CEA a déjà démantelé des sites complets. Nous avons déjà démantelé des parties de nos installation du cycle qui sont au moins aussi compliquées que des réacteurs. Et les réacteurs nucléaires, on saura les démanteler. Il faudra peut-être plusieurs dizaines d'années mais il n'y a pas d'ambiguïté : on sait faire.

Un autre article sur ce sujet : Barbara Romagnan : "Nous avons surestimé notre capacité à démanteler rapidement le parc nucléaire"


Et vous êtes confiant sur les problèmes financiers et de gouvernance qui peuvent se poser ?


Oui, car les dépenses pour le démantèlement sont provisionnées et sont inclusent dans le prix de l’électricité.

Il y a des contestations sur l'évaluation du montant.


C'est normal. Et on sait qu'il faut être performant dans le démantèlement pour que l'enveloppe soit respectée. Mais je vais vous donner un exemple : le coût du stockage des déchets nucléaires à Bure est de l'ordre de 25 milliards d'euros, le coût pour la France des importations de combustibles fossiles est de l'ordre de 60 milliards. Ça veut dire que la gestion des déchets les plus radioactifs sur l'ensemble de leur durée de vie ne représente que la moitié de ce que la France dépense en une année pour importer des énergies fossiles.

C'est un faux procès qui est fait à la gestion des déchets. J'ai travaillé 5 ans à la Hague. Les déchets les plus radioactifs, on les vitrifie et on les met dans un conteneur, est-ce que ces déchets mettent en danger la vie des gens qui travaillent sur le site ou posent problème pour l'environnement ? Non.
Après, il faudra les stocker. Est-ce qu'il y a des problématiques d'acceptation ? Oui. Est-ce qu'il y a des problèmes politiques ? Oui. Mais n'allons pas dire qu'il y a un problème technique. Vous demandez aux ingénieurs du nucléaire, est-ce que nous savons gérer les déchets radioactifs ? La réponse est oui. Où les mettre ? Ça, c'est effectivement un sujet.

Justement, quel est le rôle d'Orano sur le projet Cigeo de Bure ?


Nous ne sommes pas en charge du projet mais nous situons en amont. Nous nous préparons les produits qui seront stockés mais nous n'intervenons en aucun cas sur le centre de stockage lui-même. Même si naturellement les deux sujets sont liés : la géométrie de nos colis fait que l'ANDRA va faire des galeries qui sont adaptées. C'est pour celà que la sûreté d'un centre de stockage dépend à la fois du colis et du centre.

Est-ce que vous pouvez me donner des détails sur le contrat annoncé récemment avec la Chine ?


Pour être précis, c'est un protocole d'accord commercial qui fixe l'objectif de mettre en oeuvre le contrat - qui n'a pas encore été formellement signé - dès cette année.
De quoi s'agit-il ? Quand vous êtes un pays et que vous avez une flotte de réacteurs nucléaires ou que vous êtes en train de la développer, ce qui est le cas de la Chine qui a actuellement 20 réacteurs en construction, vous vous posez forcément la question de l'aval, c'est-à-dire de la gestion des déchets.
Les chinois se posent dès à présent la questions et ils ont décidé qu'ils s'orienteraient vers le cycle fermé, donc le recyclage. A partir de là ils ont besoin d'usines, ils se sont tournés vers nous parce que nous avons les seules usines au monde - la Hague, Melox - qui fonctionnent à l'échelle industrielle. Ils sont intéressés par notre technologie et ce sont les discussions qu'on a avec eux : fournir la technologie, les accompagner dans sa mise en place, les accompagner pour la construction - mais ce n'est pas nous qui allons construire l'usine, ça ils savent très bien faire. L'usine traitera 800T de combustible. Pour vous donner un ordre d'idée, soit la capacité pour 25-30 réacteurs.
Nous avons déjà fait la même chose au Japon mais sans la vitrification qui est la partie la plus complexe techniquement.


Publié le 25 janvier 2018 par Thibault Laconde


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