Je suis scientifique, j'ai un doctorat en microbiologie et immunologie, et j'ai été un climatosceptique. Pour ma défense, j'étais un vrai climatosceptique, pas un sceptique a sens unique adepte de la cueillette de cerises. Les bons scientifiques sont sceptiques, n'est-ce-pas ? Je me suis appuyé sur cette conviction et, pendant assez longtemps, j’ai nié toutes les preuves qui m'étaient présentées.
C'est étrange, mais lorsque j'y repense, je suis tombé malgré moi dans presque tous les pièges de la pseudo-science. Je me suis aveuglé en répétant comme un credo "je n'y crois pas", "peu importe", "ce n'est pas mon problème"...
Heureusement, ce n’est plus qu’un souvenir. Il n'y a pas eu de rupture dans l'évolution de mes idées, de l'ignorance au déni puis au scepticisme et enfin à la reconnaissance, mais je peux malgré tout distinguer plusieurs phases qu'il me semble intéressant de décrire et de discuter. J'espère que mon expérience pourra aider d’autres personnes à prendre du recul sur leurs convictions et à être plus attentives aux arguments qui leur sont présentées... Voici donc les grandes phases de mon déni du changement climatique :
"On a des problèmes plus urgents" (phase 1)
Au lycée, j’étais un écologeek fan de biologie. Mon esprit a été nourri de questions environnementales en particulier dans mon pays d'origine, l'Iran, ou pollution, chasse sauvage, déforestation et désertification sont omniprésents. Lorsque j’ai entendu parler de changement climatique pour la première fois dans les médias (rien ne nous a été dit sur ce sujet à l’école), je n’y ai vu qu’un détail par rapport à des problèmes plus immédiats : pauvreté, mortalité infantile, conflits, pollutions, etc. J’étais agacé de voir des réunions de chefs d’Etat et des manifestations sur un phénomène hypothétique et lointain alors que des enfants mouraient de causes évitables. Cette première phase s’est alors lentement transformée en…
"C’est une conspiration !" (phase 2)
Le conspirationniste en moi est sorti renforcer de la lecture d’État d’urgence de Michael Crichton, l’auteur de Jurassic Park et du Monde perdu que j’avais adoré pendant mon adolescence. Même si c’est un roman, État d’urgence a une apparence très scientifique avec des références, des graphiques, arguments et contre-arguments… Sa thèse : les médias exploitent le réchauffement climatique pour nous maintenir dans un état de peur et de culpabilité du simple fait d’être humain. J’en suis alors venu à…
"OK, peut-être, mais comment être certains que c’est notre faute ?" (phase 3)
Comme le temps passait, j’étais exposé à de plus en plus de preuves du changement climatique, au point qu’il ne m’était plus possible de le nier. J’ai donc adapté ma théorie et finalement admis un certain changement climatique : « OK, la Terre se réchauffe mais comment pouvez-vous dire que c’est à cause de nous ? Nous ne contrôlons pas la planète ! » Et de dérouler une multitude d’arguments : « C’est le soleil » ou « les mesures ne sont pas fiables » ou « le climat a varié dans le passé, c’est normal », etc. etc. (Vous pouvez trouver une longue liste de mythes sur le climat et leur explication ici, il y en a actuellement 176 mais le chiffre augmente régulièrement. Une autre, plus courte est disponible ici.)
Des études ont montré que les personnes qui adhèrent une théorie du complot tendent à en accepter d’autres, même si elles sont en contradiction entre elles. En général, cela s’explique par le besoin d’échapper à son isolement. Et puis une fois que vous croyez qu’une organisation malfaisante peut conduire des opérations aussi complexes sans que presque personne ne s’en aperçoive, alors tout vous semble plausible.
Pendant ces années, j’ai discuté et argumenté régulièrement avec les tenants d’autres théories du complot particulièrement celle sur la biologie et la santé comme l’évolution, les vaccins ou l’ingénierie génétique. Dieu merci, j’ai évité le stade méta-conspirationniste et ma stratégie de refoulement a continué à évoluer pour en arriver à…
"Ce n’est pas si important" (phase 4)
C’est devenu une idée récurrente favorisée par ma faible connaissance du changement climatique et mon incapacité à voir ses conséquences sur l’environnement. Je continuais à me retrancher derrière d’autres problèmes globaux pressant et plus tangibles. Je ne parvenais pas à voir comment les préoccupations environnementales actuelles – énergie, eau, pollution, développement durable – recoupent les actions nécessaires pour combattre le changement climatique. Cette complémentarité est évidente dans les objectifs de l’ONU pour le développement durable et leur attention particulière au changement climatique.
Finalement, je me suis dit…
"Peut-être que je suis dans le déni" (phase 5)
Aucune preuve ne m’avait convaincu de façon définitive que l’homme est responsable du changement climatique. Ce qui est normal : la science repose sur des preuves multiples. Une expérience concluante donne du poids à une théorie mais ne démontre rien. Au fur et à mesure, des chercheurs différents rassemblent plus de preuves, la théorie s’affine et parvient à expliquer de façon acceptable les phénomènes naturels observés. Mais cela a pris du temps parce que je n’ai jamais été frappé par un argument ou une information en particulier. Lorsque vous êtes dans le déni il est peu probable qu’une preuve de votre erreur vous fera changer d’avis, au contraire elle vous convaincra sans doute de vous boucher les oreilles et de regarder ailleurs. Croyez-le ou non, il existe une « Flat Earth Society », et non, je ne vais pas mettre un lien.
Et que m’est-il arrivé alors ? Quel a été la révélation ? Comment suis-je arrivé à…
"A bas la théorie du complot !" (phase 6)
J’ai commencé à me renseigner sur la façon de discuter du changement climatique avec les conspirationnistes (ceux qui adhèrent à la théorie du complot et donc ont plus de chance de nier le changement climatique) et j’ai réalisé que mon entêtement était comparable à celui des personne que j’essayais de convaincre. J’étais moi-même dans le déni.
J’ai créé une liste de toutes mes questions et mes doutes les aspects physiques, chimiques, biologiques, économiques et politiques du changement climatique et j’ai commencé à lire. J’ai pris des cours en ligne, écouté des podcasts… Et tous les mythes que j’avais en tête se sont envolés. J’ai appris que le rayonnement cosmique ne peut pas expliquer la trajectoire actuelle du climat, que les économies les moins avancées sont plus vulnérables au changement climatique que les pays riches et devraient s’en préoccuper plus, que le changement climatique pourrait accélérer la désertification et finalement que les efforts en faveur des énergies renouvelables et du développement durable permettent de combattre le changement climatique. Tout cela faisait sens sans qu’il soit nécessaire faire entrer les illuminatis dans le tableau. J’en avais fini avec la théorie du complot.
Et pour conclure
Nous avons tous nos biais. Les circonstances sociales, politiques et même personnelles peuvent ancrer une idée ou une croyance dans notre esprit. Identifier ces biais, pour les combattre ou a minima pour en être conscient, demande des efforts. Mais ça en vaut largement la peine…
* * *
Bon, et alors ?
RépondreSupprimerLa terre se réchauffe depuis la sortie de la dernière glaciation il y a 18.000 ans, avec des variations par périodes plus ou moins longues, selon plusieurs cycles qui accentuent ou modèrent les changement selon la phase de chacun.
C'était il y a 12.000 ans, la température a augmenté de sept degrés en à peine 50 ans. Quel a été le rôle de l'homme là-dedans ? Ce ne sont pas les hommes de Cro-Magnon qui ont envoyé du CO2 en quantité dans l'atmosphère pour modifier le climat.
Depuis au moins l'an 2000, la température du globe est à peu près stable. Mais le taux de CO2 augmente toujours, comme on n'arrête pas de nous le rabâcher. Avec des images à la télé.
Alors, si l'homme joue un rôle dans le climat, il doit être bien timide. Mais ne pas s'étonner que la mer reprenne parfois des terrains conquis par l'homme dans le passé là où se trouvaient des marécages.
Bonjour,
SupprimerLa variation de température que vous évoquez est - je suppose - la transition entre la dernière période glaciaire et l'optimum climatique de l'holocène. La variation a été d'environ 5°C mais plutôt sur 5000 ans (entre -12000 et -7000) que sur 50.
Peu importe d'ailleurs. Même si l'affirmation était vraie, c'est votre raisonnement est faux. Vous dites grosso-modo :
1. La Terre s'est réchauffée il y a 12000 sans que l'aide de l'homme
2. Donc l'homme n'est pas responsable du réchauffement actuel.
C'est un peu comme si vous disiez :
1. Mon oncle n'était pas fumeur et il a eu un cancer des poumons
2. Donc la cigarette ne pose pas de problème de santé (ce qui est manifestement faux sauf si vous faites aussi des piges pour l'industrie du tabac)
Ou si vous préférez : A ∧ ¬B ⇏ ¬A ∧ B.
En espérant que vous ferait un petit effort de logique formelle dans votre prochain commentaire. :-)
C'est bien une brusque variation de température en cinquante ans (50 ans), pas 5000 ans, comme cela est confirmé par un commentaire trouvé sur un autre site.
Supprimer"Le climat a toujours évolué de façon naturelle et parfois très rapide, comme il y a 14.700 ans lorsque la température a brusquement augmenté de 12°C (22°F) en à peine 50 ans.
http://www.colorado.edu/news/releases/2008/06/19/greenland-ice-core-analysis-shows-drastic-climate-change-near-end-last-ice
Une autre étude montre que l'élévation du niveau de la mer il y a 14.200 ans a été de 20 mètres en 500 ans, ce qui fait 40 mm/an."
Dans l'étude en question, c'est d'ailleurs 12°C en 50 ans (douze degrés centigrases en cinquante ans), vérification faite :
"The ice core showed the Northern Hemisphere briefly emerged from the last ice age some 14,700 years ago with a 22-degree-Fahrenheit spike in just 50 years, then plunged back into icy conditions before abruptly warming again about 11,700 years ago."
Des réchauffements brusques il y a 14.700 ans et il y a 11.700 ans. Alors, quel est le rôle du CO2 anthropique là-dedans ?
Le GIEC et les médias français avec tous leurs tapages peuvent aller se rhabiller.
Maintenant, votre exercice de logique et son misérable sous-entendu montrent bien votre embarras.
Plutôt, expliquez-nous cette baisse de température globale entre 1880 et 1910, comme celle entre 1940 et 1975, alors que la teneur en CO2 augmentait.
Bonjour,
SupprimerComme vous le savez certainement, le principe de l’effet de serre a été formulé par Fourier en 1824, le rôle du dioxyde de carbone a été identifié en 1838 par Pouillet et confirmé expérimentalement en 1860 par Tyndall. Arrhenius (en 1896) a été le premier à comprendre que l’utilisation industrielle d’énergies fossiles allait faire augmenter la température moyenne de la planète. Il a calculé qu'un doublement de la concentration en CO2 (c’est-à-dire 500ppm) entrainerait une hausse de la température de 4°C. Et devinez quoi ? C'est grosso modo ce que prévoit toujours, 105 ans plus tard, le 3e rapport du GIEC.
Alors, effectivement, je suis embarrassé : un internaute - anonyme, certes, mais lecteur de mon blog ce qui m'incline à penser que c'est quelqu'un de bien - a-t-il entre les mains la preuve que tout cela est faux ? Fourrier s'est-il trompé ? Arrhenius n'était-il qu'un imposteur à la solde du GIEC ?
Comprenez mon dilemme : j'adorerais en savoir plus et me faire expliquer longuement vos travaux, mais je vous dois aussi ce conseil : si vous êtes en mesure de prouver que tous les scientifiques se trompent depuis 200 ans, faites-en un article, envoyez-le à Science, faites-le relire par vos pairs, publiez, et allez à Stockholm chercher votre Prix Nobel.
Et sinon, les baisses de température auxquelles vous faites références sont liées aux émissions d'aérosols (http://www.ipcc.ch/pdf/assessment-report/ar4/wg1/ar4-wg1-chapter2.pdf).
Le Sahara n'était pas un désert il y a 7.000 ans, mais une région verdoyante et peuplée.
RépondreSupprimerhttp://www.hominides.com/html/exposition/sahara-il-y-a-7000-ans-eyzies-tayac-0211.php
Aujourd’hui : vaste étendue désertique ; il y a 7000 ans : territoire très peuplé grâce à une courte période humide (de l’ordre de quatre ou cinq millénaires) engendrée par le point culminant du dernier réchauffement climatique. Il est difficile de croire que cette partie du monde était parsemée de lacs et de rivières, avec des zones de forêts le long des cours d’eau, et de savanes, où vivaient éléphants, girafes, antilopes et autres phacochères.
Ce ne sont tout de même pas les hommes de l'époque qui ont brûlé tous les arbres, sans en replanter, pour envoyer du CO2 dans l'air et faire changer le climat à ce point.