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Vague de chaleur en Amérique de l'Ouest : quels impacts matériels ?

Pendant la dernière semaine de juin, une canicule de proportions historiques s'est abattue sur le nord-ouest du continent américain. Dans cet article un peu particulier, je cherche à recencer les dommages physiques causés par cet épisode. Cette liste est forcément non-exhaustive, si vous constatez que des impacts manquent n'hésitez pas à me l'indiquer en commentaire.

Pourquoi lister les dommages causés par la canicule ?

La vague de chaleur américaine de juin 2021 s'inscrit dans une liste déjà longue d'épisodes de chaleur très improbables au regard des températures historiques - en Sibérie en 2020, en Europe en 2019, au Japon en 2018, pour ne citer que quelques exemples. Et il ne fait guère de doute qu'elle en annonce d'autres tout aussi extraordinaires : il existe beaucoup d'incertitudes sur les conséquences du changement climatique mais l'apparition de canicules de plus en plus intenses n'en fait pas partie.

Parmi les évenements climatiques extrêmes, les vagues de chaleur occupent une place un peu particulière : elles nous touchent tous directement, mais en même temps leurs conséquences sont difficilement perceptible. Au contraire, vous avez peu de chance d'être frappé directement par une innondation ou un ouragan et pourtant vous pouvez certainement visualiser sans problème les dommages causés par ces phénomènes.

En appartée, je pense que si tant de médias ont des difficultés à illustrer leurs articles sur les vagues de chaleur, s'obstinant à mettre des photos de familles à la plage ou d'enfants mangeant une glace pour évoquer un phénomène meurtrier, c'est en partie à cause de cette spécificité des canicules. La grande majorité de la population est touchée modérément, occultant les vraies victimes et des dégats déjà peu visibles.

Dans cet article je cherche à lister autant d'exemples que possible de dommages matériels causés par la vague de chaleur. L'objectif est de les rendre un peu plus visible et peut-être de contribuer à la compréhension des impacts de ces événements.

Impacts matériels de la vague de chaleur américaine de juin 2021

Pour l'instant, il s'agit un peu d'une liste à la Prévert mais j'essaierai de la complèter et de l'organiser progressivement.

Electricité et énergie

  • Des coupures d'électricité ont touché jusqu'à 15000 foyers dans l'état de Washington du 28 au 30 juin. Ces délestages ont apparemment été causés par une saturation du réseau de distribution, pas par un manque de production (1).
  • Dans la région de Portland jusqu'à 6000 foyers ont été coupés d'électricité (1), ces coupures sont probablement liées à des défautts causé par l'augmentation de la température et de la consommation (2).
  • Des coupures ponctuelles ont eu lieu ailleurs en raison de défauts causés par la chaleur (dont l'explosion d'un transformateur dans la région de Seattle) ou de contact entre les lignes et la végétation (1).
  • Quelques centaines de foyers ont été coupés en Colombie Britannique (1, 2).
  • L'augmentation de la consommation a entrainé une forte hausse du prix du gaz et de l'électricité : jusqu'à 334$/MWh pour cette dernière (1).

Routes et transports

  • De nombreuses routes ont été endommagées par la chaleur. Au moins 6 cas de soulèvement se sont produit à Seattle (1), certaines réparations nécessitent une quinzaine de jour de travaux (2). Plusieurs autoroutes ont été touchés : Interstate 5 (3), State Route 544 (4), Highway 195 (5)
  • A Portland, le trafic du métro a été totalement interrompu du 27 au 29 juin (1)
  • La dilation des pièces métalliques peut empecher les ponts mobiles de fonctionner. A Seattle et Tacoma, des ponts ont du être refroidis par aspersion (1, 2).
  • La chaleur à un impact sur la charge utile des avions et sur le personnel. La compagne Alaska Air a subi de nombreux retard et quelques annulations de vols (1, 2). La chaleur peut rendre certains petits aérodromes innacessibles (3).

Entreprises, activités économiques

  • De nombreuses pannes de réfrigération ont été signalées dans la restauration et la distribution alimentaire (1, 2). Ces pannes ont entrainé des pertes de marchandises et contraint certains restaurants et commerce à fermer (3), d'autres ont fait le choix de cesser leur activité pendant la vague de chaleur pour préserver matériel et salariés (4).
  • Dans au moins deux cas, des salariés ont cessé le travail pour protester contre la chaleur dans les locaux (1). Certains ont été licenciés (2).
  • Un entrepots Amazon de l'état de Washington a suspendu ses opérations le 28 en raison d'une température trop élevée et de défauts de ventilation (1).

Agriculture

  • La chaleur peut endommager les fruits et perturbe les récoltes (1).

Impacts indirects

  • La fonte accélérée de la neige a entrainé un risque d'inondation et des évacuations au Canada (1).
  • En Colombie Britannique, 106 incendies étaient actifs le 2 juillet dont celui qui a détruit le village Lytton (1). Des routes et des installations hydroélectriques ont été endommagées (2).
  • Les conditions météorologiques ont entrainé des pics de pollution (1, 2).

Observatoire de la fracturation hydraulique - juin 2017

Chaque mois, retrouvez l'Observatoire de la fracturation hydraulique : les statistiques essentielles pour comprendre l'évolution des hydrocarbures non-conventionnels et les principaux événements qui ont touché la production de gaz et pétrole de schiste.

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Observatoire de la fracturation hydraulique et des hydrocarbures non-conventionnels



Dans l'actualité ce mois-ci :
  • Focus : le gaz de schiste a-t-il encore un avenir en Grande Bretagne après la défaite des conservateurs ?
  • La production américaine de pétrole et de gaz non-conventionnels atteint un niveau record mais la situation reste fragile.
  • L'Office of Fossil Energy, qui a joué un rôle important dans l'émergence des hydrocarbures non-conventionnels aux Etats-Unis, devrait voir son budget réduit de 58% l'année prochaine.
  • En Colombie Britannique, les résultats des élections provinciale du 9 mai pourraient contrarier les projets de Shell.

Publié le  14 juin 2017 par Thibault Laconde


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Climat : les émissions de gaz à effet de serre des 10 plus gros pollueurs de la planète entre 1990 et 2030

A la veille de la COP21, tous les pays participant à la Conférence de Paris ont été invités à remettre leurs propositions pour lutter contre le changement climatique. Malgré quelques réfractaires (notamment les pays exportateurs de pétrole), la grande majorité s'est acquitté de cette formalité dans les temps.
Ces documents (appelés INDC) contiennent les objectifs de chaque pays pour 2030. Avec un peu de patience, leur analyse permet de calculer les futures émissions de gaz à effet de serre et de dessiner la géopolitique du carbone pour les 20 ans à venir...

Dans cet article, je vous propose mes propres calculs pour les 10 plus gros émetteurs de la planète : Chine, États-Unis, Union Européenne à 27, Inde, Russie, Japon, Brésil Canada, Indonésie et Australie.
Comme d'habitude, l'ensemble des calculs et les hypothèses utilisées sont accessibles. Je vous recommande de les consulter si vous souhaitez réutiliser ces chiffres.

Pour un aperçu rapide, cette infographie présente l'évolution des émissions de gaz à effet de serre par habitants entre 1990 et 2030 :
Infographie : emissions de gaz à effet de serre par habitant pour les 10 plus gros pollueurs en 1990, 2010 et 2030 (d'après les INDC remises avant la COP21)


Évolution des émissions de gaz à effet de serre en valeur absolue


Commençons par les émissions totales de gaz à effet de serre. En 2030, les dix plus gros pollueurs de la planète devraient émettre un peu plus de 35 milliards de tonnes équivalent-CO2 contre 28GTeqCO2 en 2010.
La répartition est la suivante :
Emissions de gaz à effet de serre des 10 plus gros pollueurs de la planète, historique et projection à 2030

On voit qu'en 2030, le classement est très largement dominé par la Chine et l'Inde, responsables des 2/3 du total. Suivent de loin les États-Unis puis l'Union Européenne. L'Indonésie qui était dernière de ce top10 en 1990 atteint la 5e place. La Russie poursuit sa régression et est dépassée par le Japon. En bas de classement, on trouve le Brésil, le Canada et l'Australie.


Les émissions de CO2 par habitant


Mais les émissions totales ne sont pas un très bon indicateur : Comment comparer, par exemple, l'Australie et le Brésil alors que le second est dix fois plus peuplé ?
Pour se faire une idée plus exacte des efforts réalisés par chacun, il faut calculer les émissions par habitant. Et celles-ci racontent une autre histoire :
Emissions de CO2 par habitant passées et futures (prospective à 2030) dans les 10 pays les plus polluants du monde
L'Australie et le Canada qui étaient en queue de classement se retrouvent premier et deuxième, suivis des États-Unis. Malgré une baisse sensible de leurs émissions, la hiérarchie des pires pollueurs de la planète n'est pas modifié : ces trois pays sont déjà sur le podium aujourd'hui...
Arrive ensuite la Chine dont les émissions par habitant s'approchent de celle des États-Unis ! Les émissions indiennes aussi connaissent un bond spectaculaire : elles sont multipliée par 3 en 20 ans.

Dans le sens inverse, les européens polluent de moins en moins : avec des émissions par habitant pratiquement divisée par 2 entre 1990 et 2030, ils se trouvent en 2030 derrière l'Inde ou l'Indonésie.
Enfin, il faut saluer l'ambition brésilienne : compte-tenu de la croissance de sa population, il réalise un effort considérable. Si les objectifs définis dans son INDC sont tenus, ses émissions par habitant devraient avoir baissé de moitié en 2030 par rapport à 2010 !

Que signifient ces évolutions pour les négociations internationales sur le climat ? C'est l'objet d'un autre article que vous pouvez retrouver ici.


Publié le 5 octobre 2015 par Thibault Laconde, dernière mise à jour le 19 juillet 2016. 


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Observatoire de la fracturation hydraulique - juin 2016

Chaque mois, retrouvez l'observatoire de la fracturation hydraulique : les statistiques essentielles pour comprendre l'évolution des hydrocarbures non-conventionnels et les principaux événements qui ont touché la production de gaz et pétrole de schiste.

Les crises énergétiques qui viennent...

A quoi ressemblera la fin des énergies fossiles ? Schématiquement, deux camps s'affrontent sur cette question. A ma gauche : les tenants du "pic" qui pensent que cette fin viendra de l'épuisement de la ressource. A ma droite : les optimistes qui croient que la baisse de la demande, permise par une plus grande sobriété ou le déploiement de nouvelles technologies, sera le facteur dominant.

Les incendies de Fort McMurray et la production de sables bitumineux : une répétition des futures crises énergétiques ?Je ne me suis jamais retrouvé complètement dans cette alternative. En particulier parce que je ne crois pas, comme le suggèrent ces deux scénarios, que la fin des énergies fossiles sera progressive. La production, la transformation et le transport d'énergie jouent un rôle trop central dans nos sociétés - tout en dépendant eux-même du bon fonctionnement de l'économie pour obtenir, par exemple, le travail et le capital dont ils ont besoin - pour qu'il n'existe pas quelque part quelques rétroactions
capables de transformer une déstabilisation à priori bénigne en effondrement.
Il ne s'agit guère plus que d'un pressentiment mais je crois que la fin des énergies fossiles pourrait être une crise brutale, l'affaire de quelques années peut-être, qui nous laisserait avec des stocks encore importants mais inexploitables et sans solutions de remplacement.

Pourquoi je vous parle de ça maintenant ? En dehors du fait que ça fait très longtemps que j'ai envie d'écrire à ce sujet, parce que l'actualité nous montre des situations qui pourraient être des prototypes à l'échelle locale de cette crise énergétique.


Venezuela : "crise de liquidité" énergétique


Le premier cas dont je voudrais parler est le Venezuela : le pays produit chaque jour de l'ordre de 2.5 millions de baril de pétrole mais de nombreux analystes prédisent une baisse (voire un effondrement total) dans les mois qui viennent. Pourquoi ? Faites votre choix : instabilité politique, sous-investissement...
Mais  une des menace sur la production vénézuélienne de pétrole me parait particulièrement intéressante. Le Venezuela connaît depuis le début de l'année de grave pénurie d'électricité. Ce n'est pas un hasard : le pays dépend à 70% de sa production hydroélectrique et El-Nino entraine régulièrement une baisse des précipitation sur la moitié nord du continent sud-américain. Le dernier épisode ayant été particulièrement intense, un peu partout les barrages sont vides. C'est notamment le cas du barrage de Guri qui en temps normal produit un tiers de l'électricité vénézuélienne. Or il faut de l'électricité pour produire du pétrole... faute de précipitations, la production pourrait baisser rapidement de 100 à 200.000 barils par jour.


"Plus d'électricité donc plus de pétrole : le Venezuela connait actuellement une "crise de liquidité" énergétique."





En effet, on l'oublie souvent mais il faut de l'énergie pour produire de l'énergie, il en faut même de plus en plus. Et à ce jeu là toutes les énergies ne se valent pas : généralement, il faut investir une énergie secondaire (c'est-à-dire qui ne se trouve pas dans la nature comme l'électricité ou les carburants raffinés) pour obtenir une énergie primaire (pétrole brut, charbon...) qui elle-même sera transformée pour produire des énergies plus facilement utilisable et de meilleure qualité.
Cette boucle est un facteur de vulnérabilité important : si vous n'avez plus d'énergie facilement utilisable, vous perdez votre capacité à produire et transformer des énergies primaires quelques soient les réserves dont vous disposez. Vous pouvez ainsi, comme le Venezuela, vous retrouver dans le noir alors que vous avez sous les pieds une mer de pétrole... C'est un peu l'équivalent pour l'énergie d'une crise de liquidité dans le secteur financier : vous faites faillite pas parce que vous n'avez plus d'argent mais parce que votre argent n'est pas disponible au moment où vous en avez besoin.


Fort McMurray, un effet d'hystérésis ?


Peut-être vous dites-vous qu'une telle situation ne peut être que temporaire : passée la crise, la production va reprendre et revenir à son niveau précédent. Je n'en suis pas si sur. Un autre événement récent pourrait bientôt illustrer ces doutes.

Vous en avez certainement entendu parler : un immense incendie a ravagé les environs de de Fort McMurray dans la province de l'Alberta au Canada. Fort McMurray est la "capitale" des sables bitumineux : sur quelques kilomètres carrés au nord de la ville sont produits chaque jour 2.4 millions de barils de pétrole, soit 2.5% de production mondiale.
L'incendie a forcé près de 100.000 personnes à évacuer, ce qui a entraîné l'interruption partielle de la production d'hydrocarbures même si les installations sont largement indemnes. La production a été amputée d'environ un million de barils par jour. Comme l'exploitation des sables bitumineux nécessite beaucoup de chaleur et que celle-ci est utilisée en cogénération, la production d'électricité est aussi affectée, environ 500MW manquent à la région.
Très vite, les autorités et les compagnies pétrolières se sont montrées rassurantes : on redémarera bientôt la production - c'est l'affaire de quelques jours, on reconstruira les maisons, et tout redeviendra comme avant... En réalité le redémarrage des installations a été régulièrement repoussé depuis et il n'est pas du tout évident que la région puisse se remettre du désastre : l'exploitation des sables bitumineux s'est développé grâce au prix élevé du pétrole. On peut reconstruire des maisons mais pas recréer les conditions de ce boom. L'activité était déjà en difficulté avant les incendies : 40.000 personnes ont été licenciées et n'ont aucune raison de regarder en arrière. Et parmi ceux qui ont encore un travail mais qui ont tout perdu, combien reviendront ?


"On peut reconstruire Fort McMurray mais pas recréer les conditions qui ont permis l'essor des sables bitumineux."





Il faudra attendre plusieurs mois pour savoir définitivement ce qu'il en est. Mais cet exemple montre que la production d'énergie peut être soumise à des effets d'hystérésis : elle a besoin de conditions particulières pour se développer, elle peut ensuite perdurer même si ces conditions ont cessé d'exister mais si elle est interrompue, rien ne garantit qu'elle redémarrera.


Nigeria : effet papillon et cercle vicieux


Les cas canadiens et vénézuélien présentent plusieurs similitudes : la production est interrompue par un événement extérieur indépendant mais relativement proche et dans les deux cas cet événement est lié à une situation climatique exceptionnelle - il est intéressant de noter que le changement climatique crée un environnement favorable à ce type de disruption. Mais d'autres chaînes de causalité peuvent exister.

C'est ce qui se passe en ce moment au Nigeria. Le pays connaît une grave crise économique. Le Nigeria était l'année dernière le premier producteur du continent avec 2.5 millions de barils par jours qui fournissaient 70% des ressources publiques, il a beaucoup souffert de la baisse des cours, aggravée par des manipulations hasardeuses de la monnaie nationale. Cette crise a vidé les caisses de l’État, l'obligeant notamment à baisser de 70% les fonds qu'il versait aux anciens rebelles du Delta du Niger depuis l’amnistie de 2009.
Que croyez-vous qu'il arriva ? Les attaques contre les infrastructures pétrolières qui avaient cessé depuis cette date ont repris. Un pipeline sous-marin appartenant à Royal Dutch Shell a été saboté en février amputant la production de 250.000 barils par jour, une plateforme off-shore de Chevron a été attaquée début mai (35.000b/j en moins) et Shell s'est résolu a évacuer ses salariés le 9 mai. La production de pétrole nigériane serait tombée à 1.7 millions de barils par jour, voire à 1.4 selon le ministre nigérian du pétrole, en tous cas son niveau le plus bas depuis des décennies.
Au-delà des pertes immédiates, ces attaques peuvent faire basculer le pays dans un cercle vicieux : la baisse de la production de pétrole rend plus difficile le redémarrage de l'économie et donc la stabilisation du Delta du Niger, insécurité qui à son tour nuit à la production et aux investissements, etc.


En guise de conclusion...


Avoir des champs de pétrole ou des veines de charbon ne suffit pas à produire de l'énergie. Il faut aussi que les facteurs de productions (capital, travail, énergie, matières premières...) soient disponibles et que les conditions (économiques, politiques, sécuritaires...) soient favorables. Or ces pré-requis dépendent aussi plus ou moins directement de la disponibilité de l'énergie.
Cette mécanique complexe peut être déréglée par une mauvaise gestion ou un événement extérieur. Localement, cela arrive déjà de temps à autres et arrivera de plus en plus avec le réchauffement climatique.


"Une ressource ne suffit pas pour produire de l'énergie : il faut des capitaux, du travail, de l'énergie disponible…"




Aussi longtemps qu'ils restent locaux, ces épisodes, même s'ils sont dévastateurs pour les sociétés concernées, peuvent être compensés par la production d'autres zones et les flux commerciaux. Mais une telle crise pourrait-elle se produire à l'échelle globale ? Peut-être. Il est peu probable qu'un événement unique en soit la cause, mais pourquoi pas une conjonction de crises locales aggravée par un ralentissement des échanges qui ne permettraient plus aux zones affectées de récupérer assez vite ?


Publié le 19 mai 2016 par Thibault Laconde

Illustration : By DarrenRD (Own work) [CC BY-SA 4.0], via Wikimedia Commons



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Pourquoi le prix du pétrole baisse ? Une tentative d'explication (garantie 100% hétérodoxe).

Baisse du prix du pétrole et "peak demand", une tentative d'explication
Même si vous ne vous intéréssez pas particulièrement à la question, vous savez probablement que le prix du pétrole s'est effondré depuis mi-2014. Partis au-dessus de 115$ le baril, les indices de référence (Brent et WTI) sont passés sous les 30$ mi-janvier.
Derrière cette baisse, comme on pouvait s'y attendre, on trouve une offre supérieure à la demande : en 2015, la production de brut a été excédentaire de plus de 650 millions de barils.

Pour expliquer cette situation, la plupart des analystes pointent du doigt l'Arabie Saoudite en expliquant qu'elle entretient volontairement la surproduction afin de faire baisser les prix et de mettre en faillite les nouveaux producteurs d'hydrocarbure qui ont émergés depuis quelques années, en particulier ceux qui exploitent les huiles de schiste aux États-Unis.

Cette explication ne m'a jamais paru très convaincante et j'aimerais vous en proposer une autre, qui diffère assez peu dans le fond mais radicalement quant à ses implications.


Pourquoi la thèse du dumping saoudien contre les "oilmen" américains ne tient pas


Le rôle de l'Arabie Saoudite est incontestable. Il est, par exemple, apparu clairement lors de la dernière réunion de l'OPEP en novembre où les pays qui voulaient réduire la production se sont heurtés à son opposition. Ce qui reste mystérieux, c'est la motivation des saoudiens alors qu'eux-même souffrent de la baisse des cours.

Selon l'explication la plus fréquente, l'Arabie Saoudite tenterait tout simplement de pousser ses concurrents américains à la faillite. Cette thèse est en apparence plausible.
Il y a un précédent : L'OPEP avait tenté (sans succès) une manœuvre de ce type contre les gisements de Mer du Nord dans les années 80. Il y a un mobile : plomber les hydrocarbures non-conventionnels qui ont permis aux États-Unis a rattraper la production pétrolière de l'Arabie Saoudite en 2013.
Et de fait, les producteurs américains, dont les coûts sont élevés, ne sont pas viables économiquement avec un pétrole à 30$. Une quarantaine d'entreprises du secteur ont fait faillite l'année dernière, elles seront sans doute beaucoup plus nombreuses en 2016.

Mais si les saoudiens tentent réellement une opération de dumping pour gagner des parts de marchés au détriment des producteurs américains, leur plan ne tient pas la route.
En effet, l'exploitation des gaz et pétrole de schiste est beaucoup plus souple que celle des autres hydrocarbures : l'extraction est relativement simple techniquement, elle est peu intensive en capital et, comme vous pouvez pratiquement commencer dans votre garage (aux États-Unis, 54% du pétrole est produit par des entreprises qui font moins de 5 millions de chiffre d'affaire), une faillite n'affecte pas irréversiblement la production.
Ce sont ces caractéristiques qui expliquent que la production ait progressé aussi rapidement dans les dernières années. De la même façon, même si la production d'hydrocarbures de schiste s'effondrait, elle pourrait sans doute revenir au niveau actuel en deux à trois ans au premier signe de retournement du marché.

En fait, la baisse des cours risque de nuire plus durablement à l'off-shore profond, aux sables bitumineux et même à la production conventionnelle car ces filières nécessitent beaucoup plus d'investissements et des périodes de développement longues. Les projets qui sont abandonnés parce qu'ils ne sont pas rentables avec un pétrole à 30$ pourront difficilement redémarrer avant la prochaine décennie quelle que soit l'évolution des prix.

En bref, les oilmen souffrent mais la production américaine de pétrole, elle, pourrait sortir renforcée de cette crise. J'ai du mal à croire que l'attitude de l'Arabie Saoudite puisse s'expliquer par un paris aussi incertain.
Alors essayons autre chose...


Et s'il s'agissait d'une réaction rationnelle à l'anticipation d'un pic de demande ?


Imaginons un instant que la demande mondiale de pétrole soit actuellement proche d'un pic après lequel elle va décroitre pour devenir pratiquement nulle à la moitié du siècle. Cette perspective n'est pas que pure fantaisie, c'est celle que les pays réunis à Paris pour la COP21 ont tracé.
Dans ce cas, ouvrir grand les vannes est la stratégie la plus rationnelle pour un producteur qui possède d'importantes réserves avec des coûts d'exploitation parmi les plus faibles du monde : en vendant aujourd'hui il est assuré de réaliser un bénéfice (puisque ses concurrents ont des coûts plus élevés) alors qu'en conservant ses réserves il risquerait de les voir perdre toute valeur à mesure que la demande baisse. Ce comportement n'a rien d'exceptionnel : lorsqu'une bulle s'apprête à éclater (en l’occurrence le pendant étatique de la "bulle du carbone"), le premier qui s'en aperçoit a tout intérêt à liquider son stock en douce le plus vite possible, même à des prix apparemment inférieur à sa valeur réelle.

Est-il possible que l'Arabie Saoudite soit parvenue à cette conclusion ? Pourquoi pas, cela pourrait aussi expliquer le projet de privatisation de Saudi Aramco. Et après tout la position saoudienne a toujours été de dire que la demande de pétrole se tarirait avant la ressource : "l'âge de pierre ne s'est pas terminé par manque de pierre", n'est-ce pas...

"La perspective d'un pic de demande change radicalement l'économie du pétrole."



Allons un peu plus loin : selon l'évaluation désormais bien connue de Carbon Tracker, 80% des ressources fossiles doivent rester sous terre si nous voulons limiter le réchauffement de la planète à 2°C. C'est-à-dire qu'avec 16% des réserves prouvées de pétrole et 13% de part de marché, l'Arabie Saoudite n'a aucune chance d'exploiter complétement ses ressources.  En d'autres termes, pour les saoudiens, tout se passe comme si leurs réserves étaient désormais infinies : le pétrole n'est plus une ressource épuisable.
Cela change radicalement le "juste prix" de cette ressource : si une richesse naturelle est non-renouvelable, l'exploiter constitue un arbitrage délicat entre un bénéfice immédiat et un bénéfice futur a priori plus important, mais si elle peut être considérée comme inépuisable alors vous avez intérêt à l'exploiter à pleine capacité dès que le prix du marché vous permet de couvrir vos coûts.
Pour le dire de façon un peu plus savante : le marché du pétrole redevient ricardien avec une rente différentielle et un prix qui s'aligne sur le coût marginal de production.


Le baril sous les 40$ pour longtemps...


Cette interprétation au fond ne change pas grand chose à la compréhension de la situation actuelle - une baisse des cours entretenue par les saoudiens pour préserver leurs intérêts avec pour premières victimes les producteurs américains.
Par contre, le scénario qu'elle dessine pour la suite est bien différent.

Sur l'évolution des prix du pétrole

  • Si l'objectif de l'Arabie Saoudite est de gagner des parts de marché en détruisant les producteurs d'hydrocarbures non-conventionnels, le cours du pétrole est appelé à remonter assez rapidement. Soit parce que les saoudiens auront atteint leur but et seront libres de rentabiliser leur opération de dumping par des prix plus élevés, soit parce qu'ils auront accepté leur échec et que le marché reviendra à son état précédent.
  • Mais si l'objectif est de tirer le maximum de leur rente différentielle dans une perspective d'épuisement de la demande, alors le prix pétrole devrait converger à moyen-terme vers son coût marginal de production (probablement en dessous de 40$) et, d'ici-là, rester bas voire continuer à baisser jusqu'à ce que la production se soit ajustée.

Sur la stratégie à adopter par les producteurs

  • Si l'objectif de l'Arabie Saoudite est de pousser le maximum de producteurs de pétrole de schiste à la faillite, ceux-ci ont tout intérêt à poursuivre leur activité aussi longtemps que possible parce que les survivants peuvent espérer redevenir rentables d'ici quelques mois à la faveur d'une remontée des cours et de la disparition de nombre de leurs concurrents.
  • Mais si l'attitude saoudienne est motivée par une baisse de la demande, alors les hydrocarbures les plus couteux à produire ne sont définitivement plus viables économiquement. La production va baisser là où elle est la moins rentable (États-Unis, Canada, Brésil et Europe) et  progresser dans les pays où les coûts sont les plus faibles (Moyen Orient, Russie et dans une moindre mesure Afrique, Amérique du Sud et Asie). S'obstiner à produire à perte ne fera que pousser le prix du pétrole encore plus loin à la baisse et rendre l'explosion de la bulle plus douloureuse pour l'ensemble de l'économie.

Sur la stratégie à adopter par les gouvernements

  •  S'il s'agit d'une opération de dumping, on peut s'attendre à ce que les gouvernements soutiennent leurs producteurs. Les États-Unis qui ont levé en décembre l'interdiction d'exporter du pétrole pourraient, par exemple, être tenté d'inverser leur politique en imposant des restriction à l'importation.
  • Mais s'il s'agit d'un signe avant-coureur de l'adaptation de l'appareil productif mondial à la disparition des énergies fossiles alors il convient au contraire de faciliter et d'accompagner cette évolution.

Voilà pour cette première réflexion... Certains passages mériteraient probablement d'être affinés ou mieux formalisés. Je vais y travailler dans les prochains jours.
En attendant n'hésitez pas à me donner vos avis.


Publié le 2 février 2015 par Thibault Laconde

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Illustration : Martyn Gorman [CC-BY-SA-2.0] via Geograph

Tony Abbott et Stephen Harper : Chute de deux "climate villains" à 6 semaines de la COP21

Ça vous a peut-être échappé mais deux grands pays émetteurs de gaz à effet de serre viennent de changer de premier ministre : l'Australie, où Tony Abbott a été remplacé par Malcolm Turnbull le 15 septembre, et le Canada, où les libéraux de Justin Trudeau ont écrasé Stephen Harper hier.
Même s'ils ont exercé aux antipodes l'un de l'autre, Tony Abbott et Stephen Harper ont en commun d'avoir dirigé un des plus gros pollueurs de la planète et d'avoir pris des positions très conservatrices en matière de lutte contre le changement climatique. A 40 jours de l'ouverture de la conférence de Paris, leurs chutes quasi-simultanées lèvent deux obstacles vers un nouvel accord sur le climat.


"House of Carbon"


L'histoire du premier ministre australien, pour commencer, semble tirée directement d'un thriller politique dans lequel le changement climatique serait à la fois l'enjeu et l'arme du crime...

"Le destin politique de Tony Abbott ferait une bonne saison de House of Cards, et le climat y joue un rôle central."



Tony Abbott s'est imposé comme leader de l'opposition libérale australienne en décembre 2009 en détrônant Malcom Turnbull. Pour y parvenir, il a coalisé les climatosceptiques de son camp dans un vote de défiance à l'encontre de son prédécesseur qui était ouvertement favorable à une régulation des émissions. Turnbull ne s'est pas déclaré vaicu pour autant et s'est présenté à sa propre succession, Abbott l'a emporté... avec une majorité d'une seule voix ! Le tout à quelques jours de la conférence de Copenhague.
Après une campagne dont il avait fait un référundum contre la taxe carbone, Tony Abbott est devenu premier ministre en septembre 2013. Deux an plus tard, le 14 septembre 2015, il a été renversé par une manoeuvre interne au parti libéral menée... par Malcom Turnbull. Celui-ci lui a succédé au poste de premier ministre dès le lendemain.

L'avis d'un spécialiste sur l'éviction de Tony Abbott (via PlacetoB)

Même si la question climatique occupe une place centrale dans cette histoire, la position de Tony Abbott sur le sujet est restée assez inconsistante. Remettant parfois en cause le consensus scientifique avant 2009, il a reconnu ensuite la réalité du réchauffement tout en s'opposant au projet de marché du carbone porté par la travaillistes. Il a entrepris dès son arrivée au pouvoir de faire annuler ce système entré en vigueur en 2012 mais cela ne l'a pas empêché de soutenir d'autres projets, par exemple la loi de 2010 fixant des objectifs en termes d'énergie renouvelables.
Tony Abbott reflète plutôt la position des milieux d'affaires australiens : l'Australie a un des mix énergétiques les plus sales de la planète avec 45% de charbon et seulement un petit pourcent d'énergies renouvelables. Résultat : ses émissions par habitants sont parmi les plus élevées du G20. Par ailleurs elle dispose des 4e réserves mondiales de charbon et les combustibles fossiles représentent près du tiers de ses exportations... Autant dire que les industriels australiens peuvent voir avec une certaine inquiétude la mise en place de politiques de réduction des émissions de gaz à effet de serre en Australie et à l'international.


Fin d'un long règne au Canada


La situation au Canada est bien différente : Stephen Harper, qui a perdu sa place après les élections d'hier, était premier ministre depuis février 2006.
Avant même son arrivée au pouvoir, Stephen Harper s'était illustré par des position tout en nuance sur les questions climatiques, qualifiant par exemple le protocole de Kyoto de "conspiration socialiste" et contestant les effets négatifs du dioxyde de carbone. C'est donc sans grande surprise que le Canada s'est retiré du protocole de Kyoto en décembre 2011. Son gouvernement s'est également illustré en verrouillant l'information sur le changement climatique - par exemple en obligeant les journalistes à obtenir une autorisation avant toute interview d'un scientifique. Harper avait d'ailleurs déjà annoncé qu'il n'avait pas l'intention de se déplacer pour la COP21.

"Entre le climat et Stephen Harper, c'était une affaire personnelle... Il voyait le protocole de Kyoto comme un "complot socialiste" !"



Longtemps le Canada s'est abrité derrière les États-Unis pour camoufler son inaction sur le climat, affirmant que cette question devait être traitée à l'échelle continentale. Avec l'arrivée de Barack Obama, Stephen Harper a du assumer seul ses décisions. Pour beaucoup d'observateurs, sous sa direction, le Canada a remplacé les États-Unis comme principal ennemi d'une action internationale contre le changement climatique.
Il faut dire que le pays s'est lancé depuis les années 1990 dans l'extraction à grande échelle des sables bitumineux. L'exploitation de ces hydrocarbures particulièrement polluants a doté  le Canada de réserves de pétrole supérieures à celles de l'Iran et du Qatar réunies ! Mais les canadiens se classent aujourd'hui parmi les plus gros pollueurs de la planète par habitant.


Et maintenant ?


Sans surprises, l'Australie et le Canada avait remis des contributions décevantes en amont de la conférence de Paris. Selon leurs INDC, ils devraient faire partie du top10 des pays les plus émetteurs en 2030 et se trouver en tête de ce classement en termes d'émissions par habitant. Dans 15 ans, un canadien pourrait émettre 2.4 fois plus de gaz à effet de serre qu'un européen, et un australien 2.7 fois plus !

Le renouvellement des premiers ministres australiens et canadiens va-t-il conduire à un infléchissement de ces positions pendant la COP21 ? On peut l'espérer mais il ne faut pas s'attendre à une révolution...
En Australie, Malcom Turnbull est un opposant historique de la politique climatique de Tony Abbott mais il a sans doute aussi appris de ses erreurs et il est peu probable qu'il prenne le risque de diviser son camps par des mesures trop ambitieuses. Au Canada, Justin Trudeau, le successeur probable de Stephen Harper, a promis de travailler avec les provinces dans les premiers jours de son mandat pour mettre en place un plan de réduction des émissions mais il n'a pas pris d'engagements sur le contenu de ce plan.
Il ne faut pas oublier que, au-delà de leurs parcours et de leurs convictions personnelles, les positions de Stephen Harper et de Tony Abbott reflétaient la situation énergétique de leurs pays, avec d'un coté la manne des sables bitumineux et de l'autre le règne du charbon. Ces situations ne vont pas changer du jour au lendemain...

Reste que l'éviction de deux des pires "climate villains" de la planète est un bon signe à quelques semaines de la COP21. C'est un message adressé aux dirigeants tentés par le populisme climatique : la recette ne marche pas à tous les coups !
Et surtout le remplacement de ces deux premiers ministres ouvre une fenêtre d'opportunité qui risque de se refermer avec l'élection probable d'un républicain à la Maison Blanche en 2016... Il faudra sans doute attendre de longues années avant de retrouver une situation politique aussi favorable à un accord sur le climat. C'est maintenant qu'il faut agir !

Publié le 20 octobre 2015 par Thibault Laconde



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[Infographie] Classement des 10 plus gros émetteurs de gaz à effet de serre entre 1990 et 2030

Suite à mon article de lundi, dans lequel je détaillais les futures émissions de principaux pollueurs de la planète sur la base de leurs INDC. Je vous propose une nouvelle façon de visualiser les résultats.

Cette infrographie représente le classement des 10 plus gros émetteurs de gaz à effet de serre en 1990, 2010 et 2030. Le classement est basé sur les émissions totales de gaz à effet de serre (pas seulement le CO2).

[Article invité] Après l'inauguration d'une centrale équipée : le "charbon propre", déjà une réalité ?

Clara Kayser-Bril est ingénieur, spécialiste de l’accès à l’électricité dans les pays en développement. L’impact environnemental du système énergétique mondial est une problématique à laquelle elle s’intéresse particulièrement : peut-on concilier énergie pour tous et développement durable ?


Les premiers kWh au "charbon propre" arrivent sur le réseau


Boundary Dam 3 (centrale électrique à charbon avec captage et séquestration du carbone)
Brûler du charbon pour produire de l’électricité, c’est à peu près ce qui se fait de pire pour le climat : à chaque kilowatt-heure produit, l’équivalent de 900 g de CO2 est envoyé dans l’atmosphère – deux fois plus qu’avec du gaz naturel, trente fois plus qu’avec du solaire photovoltaïque. Mais, grâce à une technologie peu coûteuse et bien maîtrisée, le charbon continue de séduire, en permettant notamment de produire à bas coût l’électricité dont ont tant besoin les pays émergents. Et les réserves mondiales de charbon sont suffisantes pour plus d’un siècle.
C’est pour tenter de réconcilier énergie abondante et protection environnementale qu’est né le concept de "charbon propre" : capter le CO2 émis par la combustion du charbon, le stocker en lieu sûr, et voilà l’une des technologies les plus polluantes de la planète devenue quasi-inoffensive.

Testé à petite échelle depuis une dizaine d’année, le "charbon propre" serait-il en passe de devenir une réalité ? Oui, serait-on tenté de répondre après la mise en service en octobre dernier de la première centrale à charbon de taille industrielle intégrant un dispositif de captage et stockage de CO2 (CSC).

[Article invité] Confession d'un climato-négationniste

J'ai lu récemment sur le site de l'association canadienne des rédacteurs scientifiques un article de Kasra Hassani, un ancien chercheur en microbiologie reconverti dans la santé publique. Il y raconte ses doutes sur le changement climatique. Le texte m'a paru intéressant et, avec l'autorisation de son auteur, je vous en propose la traduction. (L'article original est disponible ici).


Je suis scientifique, j'ai un doctorat en microbiologie et immunologie, et j'ai été un climatosceptique. Pour ma défense, j'étais un vrai climatosceptique, pas un sceptique a sens unique adepte de la cueillette de cerises. Les bons scientifiques sont sceptiques, n'est-ce-pas ? Je me suis appuyé sur cette conviction et, pendant assez longtemps, j’ai nié toutes les preuves qui m'étaient présentées.
C'est étrange, mais lorsque j'y repense, je suis tombé malgré moi dans presque tous les pièges de la pseudo-science. Je me suis aveuglé en répétant comme un credo "je n'y crois pas", "peu importe", "ce n'est pas mon problème"...
Heureusement, ce n’est plus qu’un souvenir. Il n'y a pas eu de rupture dans l'évolution de mes idées, de l'ignorance au déni puis au scepticisme et enfin à la reconnaissance, mais je peux malgré tout distinguer plusieurs phases qu'il me semble intéressant de décrire et de discuter. J'espère que mon expérience pourra aider d’autres personnes à prendre du recul sur leurs convictions et à être plus attentives aux arguments qui leur sont présentées... Voici donc les grandes phases de mon déni du changement climatique :

Du pétrole à n'importe quel prix ? Explorez le pays des sables bitumineux avec Google Maps

Vous avez sans doute entendu parler des sables bitumineux de l'Alberta (tar sand en anglais). Pour beaucoup, ces hydrocarbures non-conventionnels sont devenus synonymes de désastre écologique, pour d'autres ils sont une fantastique découverte dotant le Canada de réserves de pétrole équivalentes à celles de l'Iran et du Qatar réunis.

Energie et developpement - mine de sables bitumineux de Fort Murray (Canada) de 1984 à 2012
Extension de la principale mine de sable bitumineux au nord de Fort Murray de 1984 à 2012

Pour vous faire une idée, je vous propose de survoler les régions productrices d'Alberta avec Google Map. Si vous préférer des images prises du sol, je vous conseille ce reportage de Garth Lenz.

D'abord, qu'est-ce le sable bitumineux ?

Le sable bitumineux est un mélange de bitume, c'est-à-dire de pétrole brut sous une forme solide ou très visqueuse, de sable, d'eau et de divers minéraux.
Avec beaucoup d'eau et d'énergie, il est possible de récupérer le bitume puis de le transformer en pétrole exploitable commercialement. La technique permettant de séparer le bitume du sable a été mise au point dans les années 20 et la première exploitation a eu lieu en 1967 près de la rivière Athabasca, la zone où se trouve encore aujourd'hui la plupart des mines canadiennes.

C'est cette zone que je vous propose de visiter. Pour cela, vous pouvez continuer la lecture de cet article ou bien naviguer librement sur la carte : elle se trouve ici.