Contre la terreur et la guerre, faisons de la COP21 un succès.

Passé le moment d'effroi, que faire dans de telles circonstances si ce n'est aller de l'avant ? Alourdi par le deuil, peut-être un peu tremblant, mais ni arrêté, ni ralenti, ni détourné de nos objectifs.

Alors voilà... Dans tout juste deux semaines s'ouvrira à Paris la 21e conférence de l'ONU sur le climat. Il ne nous reste que quelques jours pour en faire succès, et quelle meilleure réponse pourrions nous apporter à la barbarie que l'image d'une communauté internationale réunie et solidaire pour faire face aux défis qui l'assaillent ?


La COP21 aura lieu malgré tout


L'annulation ou le report de ce rendez-vous aurait été dramatique. Sans même parler du signal que ce renoncement enverrait à nos agresseurs ou des enjeux de la conférence, c'est une machinerie trop imposante pour être arrêtée à deux semaines de l'ouverture : des années de négociations avec un mandat qui prévoit l'adoption d'un accord avant fin 2015, des centaines d'évènements d'ores-et-déjà prévus, des dizaines de milliers de personnes en route pour Paris...
Pour la même raison, je ne crois pas beaucoup à l'idée de limiter la COP aux seules négociations. Même si il faut déjà réfléchir à de nouvelles formes de mobilisations, même si certains événements vont vraisemblablement être annulés, notamment la marche pour le climat du 29 novembre à Paris où 300.000 personnes étaient attendues ou les concerts dans l'espace public, je pense que la majorité des salons, débats, expositions, etc. se tiendront comme prévus.

L'ambiance de la conférence sera cependant bouleversée. On peut imaginer que le drame de vendredi va conférer à la COP21 une solennité particulière et remettre la diplomatie au premier plan au détriment des autres acteurs notamment des ONG. La Conférence de Paris ne sera pas la fête populaire qu'elle aurait pu être mais au fond, c'est ça la réalité d'une COP : une négociation internationale austère avec des enjeux immenses.


Parler de terrorisme plutôt que de climat ? Pourquoi pas les deux.


Bien sur, les discussions risquent d'être polluées. Il n'a pas fallu attendre bien longtemps avant d'entendre  par quelques individus s'offusquer que l'on réunisse les dirigeants de la planète pour discuter du changement climatique plutôt que pour agir face à la menace immédiate du terrorisme :

Mais est-ce réellement incompatible ? La question de la sécurité a toute sa place dans une conférence sur le climat car une chose est certaine : nos émissions de gaz à effet de serre nous préparent un monde dans lequel les grandes sécheresses sont plus fréquentes, les rendements de l'agriculture baissent et la montée du niveau des mers déplace des millions de personnes... Dans beaucoup d'endroits, le siècle qui vient sera sans doute plus instable et plus violent que le précédent.

Quelques cyniques diront peut-être que les habitants de pays les plus pauvres et les plus fragiles sont les premiers concernés et que nous, pays développés, avons les moyens de nous adapter et de préserver nos conditions de vie. Ça n'a rien d'évident : souvenez de Katrina et comment même la première puissance mondiale a pu être déstabilisée par un phénomène climatique. De plus les attaques de vendredi nous rappellent qu'il serait naïf de penser que l'on pourra tenir à distance la violence dans un monde en chaos.
Ce n'est certainement pas un hasard si, aux États-Unis, le Pentagone tire la sonnette d'alarme depuis des années face à l'inertie des politiques !


Le Moyen-Orient, avant-goût du réchauffement climatique


Le Moyen Orient, d'où sont venus les attaques de vendredi, est justement un laboratoire grandeur nature du monde qui pourrait naître d'un réchauffement incontrôlé. Le Croissant Fertile a toujours connu des périodes de sécheresse mais elles sont devenues plus sévères et plus longues avec le changement climatique. Entre 2007 et 2010, la Syrie a connu la plus grave sécheresse jamais enregistré dans le pays. Résultat : 1.5 millions de syriens ont été déplacés, généralement des habitants des campagnes qui sont venus s'entasser en ville dans l'espoir de survivre à la perte de leurs récoltes et de leurs troupeaux.
Combiné à d'autres facteurs économique, politiques et sociaux, ce choc démographique a conduit au soulèvement de Daraa en 2011 et, de fil en aiguille, à la guerre civile et à la montée en puissance de Daech. Il ne s'agit pas là de spéculations mais d'un lien établi par plusieurs études publiées récemment dans des revues scientifiques (notamment celle-ci ou celle-ci).

Autre point commun entre la destabilisation du Moyen Orient et le changement climatique : notre dépendance aux énergies fossiles. Daech tire des centaines de millions de dollars du trafic de pétrole, un pétrole qui après un long chemin en contrebande atterrit... dans nos réservoirs. Directement ou indirectement (via les pays pétroliers du Golfe qui les financent), les groupes terroristes du Moyen-Orient s'enrochisse de notre dépendance aux énergies fossiles.


Plus résolus que jamais !


Évidemment, il ne s'agit pas de dire que le changement climatique est responsable des attaques de vendredi mais prenons cette occasion pour rappeler deux vérités élémentaires :
  1. Le changement climatique n'est pas une menace lointaine et incertaine, c'est un phénomène en cours qui fait déjà des victimes.
  2. Limiter l'ampleur du changement climatique ce n'est pas faire plaisir aux arbres et aux petits oiseaux mais tenter de nous protéger, nous et nos sociétés, d'un choc d'une ampleur sans précédent.
C'est pour ces raisons, et maintenant plus que jamais, que nous devons faire de la conférence de Paris un succès.

Publié le 16 novembre 2015 par Thibault Laconde



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